En conclusion de cette lettre de protestation à Vl. Bakaric, l'Archevêque reportait la responsabilité de ces choses sur le président qui occupe le rang le plus élevé du parti communiste en Croatie.

Nouvelles menaces contre l'Archevêque

A la Toussaint de 1945, juste avant la Messe, deux partisans vinrent menacer l'Archevêque et lui défendre de parler contre le gouvernement, disant que s'il le faisait, tout le peuple l'attaquerait. - "Quel peuple?" demanda Mgr Stepinac. "C'est notre affaire", répondirent-ils. Alors l'Archevêque leur dit que 99 % du peuple croate était avec l'Eglise catholique.

"De toute manière, ajoutait-il, on ne meurt qu'une fois, qu'ils fassent ce qu'ils veulent mais je ne m'arrêterai jamais de prêcher la vérité."

L'homélie courageuse de Mgr Stepinac à la Toussaint 1945

La Messe commença. Au moment de l'homélie, il se mit à prêcher sur les paroles du Christ: "Heureux ceux qui ont le coeur innocent car ils verront Dieu." Puis il cita un fait de la Révolution française: les révolutionnaires détruisaient tout ce qu'ils appelaient monuments de superstition en Bretagne... Lorsqu'ils posaient aux paysans la question de savoir s'ils voulaient abandonner la religion, un paysan leur répondit:

"Nous nous arrêterons de prier lorsque vous nous descendrez les étoiles du ciel."

Ils affirmaient ainsi leur foi et la soif de Dieu qui est et reste le vrai bonheur du coeur humain. Ensuite, l'Archevêque parla de l'idéologie matérialiste de la vie, qui prétend que tout finit à la mort.

"Si ces doctrines étaient vraies, disait-il. l'homme serait la créature la plus malheureuse car aucun animal n'est conscient de sa misère. La fin de l'homme qui, par son intelligence, s'élève au- dessus des étoiles, serait-elle donc la même que celle d'un boeuf, d'un cheval ou d'un âne ou encore d'un porc ou d'un chien? Comme il faut plaindre les constructeurs de la tour de Babel du matérialisme! que de travail inutile pour aboutir toujours à zéro! Les matérialistes parlent d'un bonheur à construire mais ils ne le connaissent nullement dans leur âme."

Anatole France, mourant, saisissait les mains de son secrétaire et, en pleurant, il lui disait combien il était malheureux ! Et pourtant, on n'avait jamais cessé de lui répéter son bonheur, mais au fond de lui-même il ne le connaissait pas.

Mgr Stepinac acheva sa prédication sans dire un mot sur le gouvernement mais en insistant sur l'erreur de la doctrine matérialiste. En terminant, il informa les fidèles des menaces qu'il avait reçues; on voulait le faire taire mais, ajoutait-il, je ne crains personne sauf Dieu, et mon devoir reste le même: Sauver les âmes.

Circulaire au clergé

Le 7 novembre, l'Archevêque adressa au clergé une circulaire; il y exprime sa douleur de se voir dans l'impossibilité d'exercer son apostolat en dehors de Zagreb, vu les pressions exercées et les événements de Zapresic. Il leur donne les détails de cet attentat, cite des témoins et affirme que la version officielle est inexacte.

Il parle aussi de la promesse faite par Tito de garantir la liberté religieuse et la liberté de conscience, promesse qui n'a pas été tenue. Il leur dit qu'on attaque par tous les moyens, les Evêques, les prêtres, les religieux et religieuses, aussi bien au cours de réunions politiques que dans la presse ou par des inscriptions injurieuses sur les murs, par des calomnies ou par de fausses interprétations de soi-disant déclarations de prêtres. II attire l'attention des religieux sur la nécessité de bien peser chacune de leurs paroles, tant en prédication qu'en confession afin qu'elles ne donnent pas lieu à des interprétations fausses et qu'ils ne soient pas accusés de provocation politique. Bien qu'empêché de continuer ses visites apostoliques, Mgr Stepinac confirme qu'il reste prêt à défendre la Foi et les droits de l'Eglise, s'il le faut, même au prix de sa vie. Il termine la circulaire en demandant à tous de prier pour que les passions se calment et que la paix se lève enfin sur le Peuple croate et sur les peuples du monde entier.

Intimidations

Par la suite, ses adversaires employèrent tous les moyens pour intimider l'Archevêque.

Après sa dernière circulaire, le parti communiste décida de le mettre en prison. On commença donc à préparer l'acte d'accusation; cela dura un an... Entretemps, on essaya, par tous les moyens, de le faire fléchir.