Les congrégations catholiques de femmes, leurs institutions d'éducation et de charité ont presque journellement des difficultés et des désagréments avec le nouvel esprit qui règne autour d'elles. Combien de chicaneries doivent subir les religieuses infirmières, non seulement dans les hôpitaux de l'Etat, mais même dans les hôpitaux privés! Les procédés de certains administrateurs nommés dans les hôpitaux tenus par des Soeurs, montrent l'intention évidente de rendre impossible aux Soeurs leur activité charitable pour le bien des malades. Ils veulent même leur enlever les hôpitaux qu'elles ont ellesmêmes bâtis et entretenus avec toutes sortes de difficultés par le travail de leurs mains et au prix de sacrifices inouïs.
Labourage des cimetières militaires
Enfin, pour terminer, très chers fidèles, il faut que nous vous signalions un autre fait douloureux et surprenant pour nous: on n'a même pas épargné les tombes des défunts. Aux cimetières de Zagreb, de Varazdin et d'autres lieux, sur les ordres directs des autorités régulières, on a enlevé les croix des tombes des oustachis et des soldats allemands, et on a nivelé la terre de façon qu'on ne puisse plus identifier le lieu d'aucune sépulture individuelle.
Cette manière de faire doit être absolument condamnée: devant la mort, tous les hommes s'inclinent et l'ennemi lui-même cesse d'être un ennemi, en vertu de lois non codifiées mais de convenances humaines, qui découlent de la charité chrétienne, et cet ennemi a droit, lui aussi, à une tombe convenable. On sait qu'à la suite de la dernière guerre mondiale, les anciens ennemis ont respecté et conservé les tombes des soldats de l'armée conquérante, qui étaient tombés en terre étrangère. Et voici que chez nous on refuse de reconnaître ce droit sacré aux propres fils de cette terre!
Vaines interventions
Très chers fidèles, notre sollicitude ne s'est pas limitée aux besoins directs de l'Eglise, de ses établissements et de ses prêtres. Connaissant les souffrances et les peines de tant de nos fidëles, nous avons fait, de notre côté, tout ce que nous pouvions pour alléger leur sort dans ces jours d'épreuve et de crise. Ainsi, nous sommes intervenus à diverses reprises, oralement et par écrit, auprès des autorités compétentes, pour obtenir la grâce de ceux que les tribunaux avaient condamnés à mort. Nous avons demandé, de plus, et avec insistance, qu'on leur accorde, à leurs derniers moments, les consolations de la religion. Nous avons demandé aussi, qu'on veuille donner aux parents de ceux qui avaient été exécutés, les indications nécessaires pour trouver la tombe de leurs défunts. Tous ces services, nous les avons aussi rendus à la demande des familles des malheureuses victimes des luttes fratricides, sous le régime des précédentes occupations militaires.
Pour ceux qui ont été internés dans les camps de concentration, nous avons demandé qu'on renseigne les familles sur le lieu de leur internement. Nous sommes intervenus pour que ceux dont la culpabilité n'est pas démontrée soient rendus le plus vite possible à la liberté. Nous avons attiré l'attention des autorités sur le cas de tant d'intellectuels restés sans emploi et qui ne sont pas en état de gagner le pain de chaque jour pour eux et leur famille.
A tous ceux qui nous en ont priés, nous nous sommes efforcés, dans la mesure de nos moyens, de venir en aide, ayant en vue seulement le précepte de la charité chrétienne et le droit à la justice de ceux qui s'adressaient à nous. Nous n'avons jamais, en tout cela, considéré l'opinion politique de chacun, pas plus que pendant la guerre nous n'avons demandé à ceux que nous assistions de quelle religion ou de quelle nationalité ils étaient. En faisant cela, nous ne nous sommes pas laissés arrêter par l'accusation injustifiée que nous faisions ainsi une propagande déloyale dans un but politique, car nous avions conscience de ne pas entreprendre une action politique, mais seulement d'accomplir notre mission dans l'esprit de charité envers le prochain, tel que l'a enseigné le Christ.
Si nous n'avons pas réussi dans les questions les plus importantes, la faute ne nous en incombe pas.
Nous avons conscience d'avoir parfaitement accompli notre devoir. Nous souffrons dans notre coeur de n'avoir pas pu porter secours là où il était si nécessaire et où il y avait tant de larmes à essuyer.