Par sa souffrance personnelle, il ressentait le drame et la tragédie de tout homme, quelles que soit sa race, sa nationalité ou sa religion. Cet amour universel, puisé dans sa foi en Jésus- Christ et en l'Evangile, il le témoignait pratiquement et concrètement par ses oeuvres caritatives et ses interventions pour soulager les souffrances humaines. Il s'occupait courageusement et résolument des persécutés, des emprisonnés, des torturés, de quelque côté que vinssent les violences et les injustices. Il exigeait de chaque pouvoir en place que les jugements fussent équitables, les lois humaines, les procédés respectueux de l'homme.

C'était d'ailleurs le devoir de l'Eglise à ce momentlà; c'est encore le devoir de l'Eglise aujourd'hui. Si le Pape et les Evêques, aujourd'hui et partout, s'engagent pour le droit des peuples et des personnes, s'ils sont contre la torture et les condamnations injustes, où qu'elles se produisent, s'ils s'emploient auprès des autorités en faveur de l'amnistie des prisonniers politiques, il le font pour remplir leur mission au nom de l'Evangile de l'amour, qui est universel, qui n'offense ni ne provoque mais prie et pardonne. L'Eglise témoigne ainsi pour la Vérité, et "la Vérité est la force de la paix", dit le Pape Jean- Paul II. Ce n'est pas du tout une lutte de l'Eglise pour le pouvoir. C'est la mission de l'Eglise.

C'est pourquoi, dans sa lettre circulaire aux prêtres du 17 décembre 1945, l'archevêque Alojzije Stepinac écrivait ce qui suit: "A toutes les accusations, qui nous sont directement ou indirectement adressées, nous pouvons répondre que nous n'avons rien à nous reprocher. Nous avons la conscience pure et tranquille devant Dieu, qui est le témoin le plus fidèle et le juste juge de toutes nos démarches. Nous avons la conscience pure et tranquille devant le Saint-Siège, qui pourra un jour, sur la base de documents authentiques apprécier toute notre activité. Nous avons la conscience pure et tranquille aussi devant les catholiques de ce pays, qui jugent les événements calmement et lucidement. Enfin, nous avons la conscience pure et tranquille devant le peuple croate, auquel par la volonté de Dieu nous appartenons par les liens du sang et que nous servons de toute notre âme, à notre place, en dépit des divers points de vue et partis politiques."

C'est pourquoi nous aussi nous continuons: "L'Histoire aura le temps, la manière et la possibilité d'analyser en toute objectivité tous les événements, les faits, les circonstances et les situations, toute la tension dramatique, tragique même, de la période pendant laquelle l'archevêque Alojzije Stepinac a agi, parlé et souffert. Sans crainte pour son honneur, nous attendons ce jugement de l'Histoire." (Circulaire du 26-1- 1980.)

L'archevêque Alojzije Stepinac est mort voici vingt ans. L'Eglise de Zagreb lui a fait ses adieux ici dans la cathédrale le 13 février 1960, dans la dignité de la prière, dans l'espérance de la résurrection, avec foi dans le jugement final de Dieu, qui s'exprimera sur chaque homme et sur l'Histoire entière.

Depuis lors, la silencieuse procession des priants ne cesse de défiler au tombeau de l'archevêque. "Les fleurs ne se fanent pas; les cierges ne s'éteignent pas; ils expriment en silence la foi du peuple de Dieu en la vie éternelle et en la justice finale. Là on respire l'amour de tous ceux qui pardonnent. Tel est le commandement de Dieu." (Ibid.).

Il nous reste le message de foi et d'espérance que de l'éternité le Cardinal Stepinac nous adresse..."